18 février 2013

Discussion avec Athéna




Je suis assise devant une page blanche, les doigts sur le clavier, immobile. Il y a un moment que je songe à écrire, mais il semble que les mots me quittent au fur et à mesure que l’ennui m’habite. J’ai l’impression d’être prise dans l’engrenage infernal de l’éternelle semaine de cinq jours et de la trop courte fin de semaine où les activités toutes entassées me laissent essoufflée et sonnée.

Athéna saute sur le bureau d’ordinateur qui oscille dangereusement sous son poids lourd. Il aurait fallu monter le bureau selon les règles, mais comme mon mari et moi ne suivions pas tout à fait les plans lors de la construction de nos premiers meubles, il reste ainsi. Le morceau manquant ayant été jeté, faute de place.

Les yeux verts d’Athéna me fixent et je décèle une lueur d’intelligence derrière son air gourmand. Outre le yogourt que j’ai laissé à moitié fini à ma droite, elle vise à me rassurer : je ne suis pas seule.

-          Miaou!
-          Qu’est-ce que tu dis minoune? Tu me demandes pourquoi je suis ici, immobile? Pourquoi je ne te caresse pas?
-          Miaou!
-          Je sais, j’interprète tes miaous comme si c’était des paroles. Je ne devrais pas faire ça. Tiens, je vais te flatter, tu as raison. Ça ne sert à rien de laisser mes doigts gelés sur le clavier.

Mes doigts effleurent d’abord ses poils, puis j’ébouriffe gaiement le dessus de sa tête. Elle se laisse faire comme une idiote et mes doigts glissent derrière ses oreilles. Doucement, elle se penche, puis sans prévenir, elle s’effondre les quatre pattes en l’air, son ventre blanc exposé à l’air. 

-          P’tite téteuse, je luis dis en continuant à la flatter tandis qu’elle commence à ronronner. Tu veux me dire de ne pas m’en faire, hein? Que je suis mieux de m’occuper de choses triviales que de lire les nouvelles, de vouloir m’arracher les cheveux et puis écrire aux autres de se réveiller? J’ai raison?
-          Rawrrr.
-          Ouain, tu ne réponds pas fort fort, toi. On ne peut pas vraiment argumenter avec un chat, de toute façon. 

Vivement, elle me donne un coup de patte, comme énervée par les caresses que je lui ai prodiguées. Elle ne veut plus d’amour, elle veut jouer. C’est clair comme de l’eau de roche dans ses pupilles noires extasiées. Ses pattes d’en arrière s’accrochent à mon bras et sans réagir, je la laisse me griffer.

-          Tu es tellement tannante, toi. Bon, j’ai perdu mon humeur de personne déprimée de la vie qui désire secouer toutes les personnes qui ne s’intéressent qu’à leur petit moi intérieur et qui ne se rendent pas compte à quel point ils sont lavés du cerveau… Les gens ne s’intéressent qu’aux apparences et à l’immédiat…

Mes yeux vagabondent sur l’écran encore ouvert sur une page blanche tandis qu’avec ma main droite, j’agace mon chat qui s’impatiente. Soudain, sans crier gare, je sens ses canines sur ma main ouverte.

-          Ouch, minoune!
-          Miao…

Je me mets à rire en voyant qu’il ne s’agit que d’une morsure mineure. Pas de trace de dents. Ouf! Ça ne me tentait pas de retourner à la clinique, moi. Puis doucement, une idée vient en moi. Et si moi aussi je m’intéressais seulement à l’artificiel, aux apparences et à l’immédiat? Peut-être qu’en me mordant, Athéna a voulu me dire que je devais faire plus attention à l’instantané, qu’elle ne m’aurait pas mordu si…

Je remarque que mon chat, ayant profité de ma distraction, est en train de manger ce qui reste du pot de yogourt que j’ai laissé en plan.

Il ne faut pas trop analyser, quand on interagit avec un chat.

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